
Par la Rédaction
Vital Kamerhe, le désormais président de l’Assemblée nationale rd-congolaise, a partagé, dans son discours d’investiture, lu à l’attention des députés nationaux aux premières heures de ce jeudi 23 mai 2024, quelques instants après sa victoire avec 371 voix sur les 407 possibles, sa vision pour la législature 2024-2028 à la chambre basse du Parlement. En filigrane de ce discours apparaît le plus grand pari de Kamerhe : aider le Président Tshisekedi à matérialiser sa vision, pour le bien-être du peuple congolais. Ainsi, à travers son grand oral, le leader de l’UNC, une fois de plus, a fait mentir ses détracteurs qui, en vain, tentent de le monter contre le Chef de l’Etat. Aussi, pour son retour au perchoir, Kamerhe a épinglé un fait nouveau : l'Ouganda comme pays agresseur de la RDC. Il est ainsi la première autorité congolaise à pointer du doigt le pays de Museveni, en plus du Rwanda, comme auteur de la déstabilisation de la partie Est de la RDC.
VK a tenu un speech, dépecé en dix points par Opinion-info.cd pour cerner, d’un côté, les défis que l’homme entend relever aux commandes de l’Assemblée nationale. De l’autre, l’opinion du speaker sur certains faits d’actualité.
1. L’unité entre députés
Autour du Président Félix Tshisekedi se forme une majorité hétérogène de plus de 400 députés nationaux. Cette majorité, au cours de ces quatre premiers mois depuis l’installation de la nouvelle Assemblée nationale, a donné plus de migraines qu’elle n’a apporté des solutions, tant les uns et les autres veulent faire prévaloir leurs ambitions personnelles.
Kamerhe a senti le danger qui guette l’Union sacrée de la nation, famille politique du Président Tshisekedi. Il a, de ce fait, pris le pari de favoriser l’unité entre les députés nationaux, question de canaliser et de gérer les ambitions et les revendications, sans impacter sur le temps constitutionnel imparti au Chef de l’Etat, pour matérialiser ses promesses électorales.
«Nous devons afficher l’unité», a insisté le leader de l’UNC dans son oral, jurant de mouiller sa chemise pour assurer «la reconquête de la dignité, de l’honneur et de la noblesse qui accompagnent le travail parlementaire».
En plus, Kamerhe, en bon manager, a placé chaque député national devant ses responsabilités, tout en lui rappelant le «devoir sacré» à accomplir en faveur de «l’amélioration des conditions» du peuple électeur. A l’en croire, remplir ce «devoir sacré» importe, pour les députés nationaux, de travailler main dans la main, pour aboutir aux résultats qui vont remplir d’«allégresse» la population et lui mettre dans les conditions d’accepter de les «recevoir» pour le bilan.
2. Restaurer le député dans son honneur
En RDC, le député national est de plus en plus perçu telle une personne qui vend ses votes au plus offrant, pour s’assurer une aisance de vie. Cette image, qui a terni le statut du député national, Kamerhe a juré de la changer. Réputé fin stratège, l’élu de Bukavu semble bien avoir la formule pour y parvenir. Il a demandé à ses collègues de «compter sur» lui pour redonner à «l’Assemblée nationale ses lettres de noblesse» et réhabiliter le «député national dans son honneur et dans sa dignité». Cette mission, Kamerhe entend la mener avec dextérité, tant il reste persuadé que «le député, en tant qu’élu du peuple, mérite respect et considération».
3. Guerre dans l’Est : y mettre définitivement fin
La problématique de la guerre dans l’Est de la RDC sera «au cœur des préoccupations quotidiennes» de Vital Kamerhe durant son nouveau passage à la tête de l’Assemblée nationale. Il entend s’appuyer sur la diplomatie parlementaire et l’implication des députés dans les questions qui concernent le retour de la paix dans la région du Kivu, en Ituri et dans d’autres coins de la RDC, confrontés à des conflits intercommunautaires meurtriers.
Sans langue de bois ni passer par le dos de la cuillère, Kamerhe a dénoncé l’«agression féroce» dont le pays de Tshisekedi est victime de la part du «Rwanda et (de) l’Ouganda».
«Le temps de restaurer la paix et la sécurité et de stopper définitivement cette guerre injuste, que nous subissons ainsi que toutes les atrocités qui s’en suivent, s’impose», a-t-il tapé du poing, profondément convaincu de la capacité et de la détermination du gouvernement à rétablir la paix et la sécurité dans l’Est du pays.
4. Le putsch manqué du 19 mai
Cible d’une attaque armée, perpétrée au petit matin du dimanche 19 mai dernier, par un certain Christian Malanga et ses hommes, Vital Kamerhe est brièvement revenu sur cette page «terrifiante» de son livre de vie. Aux côtés de sa femme, Hamida Chatur, il a frôlé d’avaler sa chique et de manquer le rendez-vous avec le perchoir. «Nous avons eu la vie sauve grâce à la miséricorde divine», a-t-il dit, non sans mentionner qu’il est passé «par des émotions parfois contradictoires», avant de retrouver, 15 ans après, le rôle de speaker de l’Assemblée nationale. En plus de remercier Dieu, Kamerhe ne s’est empêché de glisser, dans son speech, un extrait du Psaumes 91 et de recommander la lecture du 23ème chapitre de ce même livre de la Bible.
Par ailleurs, la désormais deuxième personnalité du pays s’est réjoui de l’échec de Malanga et sa milice à «déstabiliser les institutions de la République». Il a déploré «l’incursion» au Palais de la Nation, bureau officiel du Président de la République, par les assaillants.
5. Matérialiser la vision du Président Tshisekedi
C’est le plus grand défi de Kamerhe à la tête de l’Assemblée nationale : matérialiser la vision du Président Tshisekedi, à qui l’homme a rendu des «hommages les plus déférents», non sans demander, en son honneur, des «applaudissements de manière frénétique».
Le successeur de Christophe Mboso en a appelé à «l’union des intelligences» au sein du Parlement pour «placer la République démocratique du Congo au cœur de la transition énergétique», et ainsi permettre au pays de retrouver son rôle de «moteur pour le décollage de l’Afrique subsaharienne».
«C’est ce Congo-là, rêve de Kimbangu et de Lumumba, que le Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo veut concrétiser sous forme d’héritage aux générations futures», a-t-il souligné.
Ce rêve, à scruter les propos de VK, ne peut prendre corps que si les députés misent sur la stabilité institutionnelle, des réformes pertinentes et courageuses et la compétence dans le contrôle parlementaire.
6. Un bureau genré
«C’est pour la première fois dans l’histoire parlementaire de notre pays, que le président de l’Assemblée nationale a trois femmes et trois hommes de tous les âges : les jeunes et les sages», a, avec un brin de fierté, révélé Vital Kamerhe qui dit être «chanceux» de se retrouver à la tête d’un bureau aussi genré que celui installé ce jeudi 23 mai 2024.
«C’est extraordinaire», s’est-il exclamé, non sans mettre en exergue le «respect des critères de la géopolitique et de la représentation suffisante de la femme, comme l’a souhaité le Président de la République ».
7. Clin d’œil à Mboso
Dans l’opinion comme dans les réseaux sociaux, les commentaires ont fusé dans tous les sens, pour opposer Kamerhe à Mboso depuis la défaite du second aux primaires de l’USN pour le perchoir, remportées par le premier. Une vidéo, montée au moment de la proclamation de la victoire de Kamerhe, a clairement montré Mboso boudant de saluer le leader de l’UNC, pendant que Modeste Bahati, arrivé troisième dans ces primaires, a fait preuve de fair-play et d’élégance politique en félicitant le vainqueur.
Pour Kamerhe, pas besoin de ressasser cet épisode, tant, à ses yeux, l’unité et la cohésion au sein du Parlement et de l’USN passent avant toute considération égoïste. Le chef de file du PRC -Pacte pour un Congo retrouvé- a voulu impulser un climat de paix et d’harmonie dans le bureau définitif de la Chambre basse au sein duquel Christophe Mboso va jouer le rôle de deuxième vice-président. Il a donc donné le ton dans son discours d’investiture, en faisant un clin d’œil à Christophe Mboso et en «saluant l’exercice démocratique, minutieusement mené par le bureau provisoire», qui a été dirigé par ce vieux briscard.
8. Parole à l’Opposition
Sous le règne de Vital Kamerhe, l’Opposition, «malgré sa dimension», a droit à la parole à l’hémicycle. C’est aussi le leitmotiv de VK, déterminé à faire de l’Assemblée nationale «un véritable temple d’expression démocratique où le débat démocratique aura bel et bien lieu». Et ce, quoi que l’Opposition, pour cette législature, compte moins de 50 députés sur les 500 sièges qui composent la chambre basse.
Le nouveau speaker s’attend à des débats de qualité pour faire «jaillir la lumière qui va baliser le chemin» de la matérialisation du projet de société du Président Tshisekedi. Impossible d’avoir droit à ces débats avec une Opposition muselée.
9. Le travail dans la discipline
Pas de succès sans un travail dans la discipline. Ce principe managérial, Kamerhe semble l’avoir parfaitement bien maîtrisé, au point de l’évoquer dans son discours d’investiture.
Il a, d’ores-et-déjà, recommandé aux députés nationaux de «travailler en équipe et dans la discipline». Par discipline, le nouveau speaker entend le respect de l’heure de travail ainsi que la régularité dans le contrôle parlementaire et dans la production législative.
«C’est au prix de cette discipline, qui n’aliénera ni votre liberté ni votre esprit initiatique, que nous serons en mesure d’assurer la cohérence du travail parlementaire et d’aborder sainement les défis de cette législature», a-t-il exhorté.
10. L'Ouganda, pays agresseur de la RDC
Vital Kamerhe, par son oral de ce jeudi matin, est devenu l'une des rares autorités congolaises, si non la seule, à pointer du doigt le rôle de l'Ouganda dans la déstabilisation de la partie Est de la RDC. Ce pays frontalier, à en croire Kamerhe, souffle le chaud et le froid et tente de se faire passer pour un ami qui soutient la RDC à pacifier son territoire.
Profitant de son côté pile, l'armée ougandaise est parvenue à conclure une alliance avec les Forces armées congolaises, afin de traquer, depuis environ deux ans, des terroristes ADF, originaires de l'Ouganda, qui sévissent dans la région de Beni, au Nord-Kivu, ainsi que dans la province de l'Ituri.
Pourtant, dans son côté face, l'Ouganda est, selon les affirmations de Kamerhe, auteur d'une «agression féroce» contre la RDC. Et ce, en complicité avec le Rwanda.
Kamerhe, pour qui l'heure du rétablissement de la paix et de la sécurité a sonné, veut enrayer les visées sanguinaires de ces deux pays frontaliers à la RDC.