
Par Bijou NDJODJI BATEKO
Visiblement, ils sont très déterminés à aller jusqu'au bout de leur démarche, telle que détaillée dans leur plan de sortie de crise dénommé :"Pacte pour la paix en RDC et le bien vivre-ensemble dans les Grands Lacs". En effet, préoccupés l'instabilité récurrente dans la partie orientale de la RDC -République démocratique du Congo-, les évêques catholiques et protestants ont conçu un projet de sortie de crise, dont l'objectif est de "construire la paix durable" et renforcer la cohésion nationale en RDC, ainsi que de créer le bien vivre-ensemble dans la sous-région des Grands Lacs.
Les encouragements de Tshisekedi
Aussitôt le projet conçu, les évêques catholiques et protestants sont allés, le lundi 03 février 2025, le présenter au Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, à la cité de l'Union africaine. Il ressort que le Chef de l'État a reçu cette initiative, l'a beaucoup appréciée et a même encouragé les pères évêques dans leur démarche.
À en croire d'aucuns, ces encouragements de Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo constituent une sorte de bénédiction dont les évêques bénéficient de la part du Chef de l'État, pour continuer leur odyssée.
Le Parlement salue
Après l'Institution Président de la République, la délégation de la CENCO -Conférence épiscopale nationale du Congo- et de l'ECC -Église du Christ au Congo- a rencontré le président de l'Assemblée nationale, le professeur Vital Kamerhe, pour lui faire part du même projet de sortie de crise dénommé "Pacte pour la paix en RDC et le bien vivre-ensemble dans les Grands Lacs" et la démarche à suivre. Au nom de la Représentation nationale, Vital Kamerhe a salué l'initiative des pères évêques catholiques et protestants, non sans leur promettre tout son soutien et accompagnement.
Les confessions religieuses saisies
Dans leur démarche, les évêques catholiques et protestants sont allés aussi présenter leur projet de sortie de crise à leurs pairs de la plateforme des confessions religieuses, dirigée par l'évêque Ejiba Yamapia de l'ERC -Église de Réveil du Congo-.
L'opposition non armée pas en reste
La délégation CENCO-ECC n'a pas oublié les grandes figures de l'opposition politique rd-congolaise non armée, du moins celles qui se trouvent présentement à Kinshasa, la capitale de la RDC. C'est dans cette optique qu'elle est allée à la rencontre, à tout de rôle, de Martin Fayulu de l'ECiDé -Engagement pour la Citoyenneté et le Développement-, de Delly Sasanga de l'Envol et d'Adolphe Muzito de Nouvel Élan.
Pour témoigner de leur soutien et adhésion à cette initiative des évêques catholiques et protestants, tous ces trois leaders de l'opposition politique rd-congolaise non armée ont suggéré, chacun et séparément, quelques propositions, du reste, saluées par la délégation CENCO-ECC.
Promesses rassurantes de Nangaa
De Kinshasa, destination : Goma, à la rencontre de Corneille Nangaa, chef de la coalition rebelle M23-AFC. Ici, aux dires des pères évêques catholiques et protestants, les réponses du camp rebelle sont on ne peut plus "rassurantes".
Corneille Nangaa a rassuré que lui et sa rébellion ne sont pas dans la dynamique de la balkanisation de la RDC ni dans celle de l'exploitation illicite et illégale des minerais.
Des échanges qui ont fait comprendre que "beaucoup de choses peuvent avancer par le dialogue." Ce qui a réconforté les évêques catholiques et protestants dans leur démarche, eux dont l'objectif de la rencontre avec Corneille Nangaa était de convaincre que "la lutte armée n'est pas la solution aux problèmes de la RDC."
Profitant de l'occasion, la délégation CENCO-ECC a "fait le plaidoyer pour l'ouverture du port et de l'aéroport, mais a aussi sollicité l'arrêt des hostilités; car, il y a plusieurs conséquences de la guerre."
La coalition rebelle M23-AFC a salué l'initiative des pères évêques catholiques et protestants, et leur a déclaré avoir pris en compte leur plaidoyer pour la cessation des hostilités, ainsi que pour l'ouverture du port et de l'aéroport.
Kagame, premier Chef d'État consulté dans les Grands Lacs
Après avoir échangé, mercredi 12 février, avec la coalition rebelle M23-AFC, la délégation CENCO-ECC a ouvert, jeudi 13 février, la série de rencontres avec les Chefs d'État de la sous-région des Grands Lacs. L'objectif ici, selon le communiqué de la Rédaction du Pacte Social pour la Paix, est de recueillir les réflexions de ces Chefs d'État en faveur d'une paix durable en RDC et dans la sous-région.
C'est ainsi que la délégation CENCO-ECC a échangé, ce même jeudi, à Kigali, la capitale rwandaise, avec le Président Paul Kagame, dont le pays, le Rwanda, est aujourd'hui reconnu officiellement comme l'agresseur principal de la RDC.
Même si rien ne semble encore filtrer de l'entretien avec Paul Kagame, le communiqué de la Commission Justice et Paix de l'ECC souligne que "cette initiative, qui s'inscrit dans une dynamique de cohésion nationale et de respect de l'intégrité territoriale, vise à favoriser la stabilité, le dialogue interétatique et la réconciliation."
Jusqu'où iront les pères ?
Difficile à ce stade de répondre à cette interrogation. Toutefois, au regard du communiqué de la Rédaction du Pacte Social pour la Paix, tout laisse entrevoir que les pères évêques catholiques et protestants sont déterminés à rencontrer toutes les parties et tous les acteurs internes comme extérieurs impliqués directement ou indirectement dans ce conflit qui déstabilise la partie orientale de la RDC depuis plus ou moins trente (30) ans.
Car, si le communiqué indique que Paul Kagame est le premier d'une série de Chefs d'État de la région que ces pères évêques catholiques et protestants ont tenus à rencontrer, c'est que, après le Président rwandais, la délégation CENCO-ECC devra consulter d'autres dirigeants des Grands Lacs. "Ces consultations sont essentielles pour construire une coopération régionale fondée sur des valeurs de justice, de paix et de développement harmonieux... Face aux défis sécuritaires persistants, l'ECC et la CENCO appellent à un engagement collectif et responsable des acteurs politiques, religieux et sociaux, afin de promouvoir un climat propice à la coexistence pacifique et au progrès socio-économique. Cette démarche stratégique renforce ainsi la diplomatie religieuse comme levier pour la consolidation de la paix dans la région des Grands Lacs", lit-on dans le communiqué de la Rédaction du Pacte Social pour la Paix.
Lueurs d'espoirs
La démarche des pères évêques catholiques et protestants coïncide avec les retombées diplomatiques en faveur de la RDC. Des retombées diplomatiques dans le sens des sanctions contre le Rwanda, le condamnant d'être l'agresseur principal de la RDC, en appui à la coalition rebelle M23-AFC dans les provinces du Nord et du Sud Kivu.
En premier, la Commission Paix et Sécurité de l'UA -Union africaine- a, à l'unanimité de ses membres, condamné tout soutien du Rwanda aux rebelles du M23-AFC et la présence des troupes rwandaises sur le sol rd-congolais. Un début de l'isolement diplomatique déjà au niveau du continent africain.
Ensuite, il y a l'adoption, jeudi dernier, par le Parlement européen, à une écrasante majorité, d'une résolution condamnant l'ingérence du Rwanda en RDC. Le Parlement européen exhorte la Commission et le Conseil de l'UE -Union européenne- à suspendre le Mémorandum d'entente sur les chaînes de valeur des matières premières durables, signé avec le Rwanda. Et cette suspension resterait en vigueur tant que Kigali n'aura pas cessé toute ingérence en RDC, notamment l'exportation des minerais issus des zones sous contrôle des rebelles du M23-AFC.
Décidément, l'étau se resserre autour du Rwanda. Des pressions qui peuvent pousser à la fin d'une crise qui a déstabilisé la RDC il y a 30 ans et continue d'endeuiller les Congolaises et Congolais, qui comptabilisent déjà plus de dix millions des morts, des centaines de milliers des déplacés et réfugiés, ainsi que des femmes et filles violées.
S'agit-il d'une simple coïncidence ou ce sont les premières retombées de la diplomatie religieuse, qui vient en appui à la diplomatie déjà engagée par les autorités congolaises ? La question reste pendante et l'avenir, lui, nous le dira.