
Par Patrick Kitoko
Kinshasa, une mégapole de plus au moins 17 millions d'âmes, avec ses embouteillages ennuyants, ses bruits incessants, sa chaleur suffoquante, ne cesse de nous surprendre.
Un nouveau phénomène de mendicité vient de voir le jour à Kinshasa, exposant plus d'un Kinois à l'épreuve des sentiments internes qui contrastent empathie et indifférence ou insensibilité : c'est le phénomène "sunga mwana etshiké", entendez en lingala "venir en aide à l'orphelin ou enfant abandonné". Il s'agit, en clair, d'exposer, sur la place publique, dans un carrefour quelconque, un enfant présentant des cas soit d'ameloblastome (cancer malin au niveau de la mandibule) ou de colostomie, pour susciter la compassion des passants, afin de leur soutirer quelques sous.
De l'avis de plus d'un expert médical, il s'agit de la pure mendicité déguisée, d'autant plus que la plupart des cas présentés sont incurables, pour avoir atteint un degré terminal et la médecine n'en ayant plus une thérapeutique appropriée.
Et, aujourd'hui, plus aucun grand carrefour de la capitale congolaise, à savoir, rond point des Huileries, Assanef, rond point UPN, Kintambo Magasin, Matadi Kibala, rond point Ngaba, n'est épargné par la présence de ces gens, qui se livrent à à ce phénomène.
Devant pareilles scènes, seule la bonne intention ne compte pas. Pour beaucoup, en écoutant les paroles qui accompagnent cette demande d'aide, loger le diable dans ses poches en ce net moment, recouvre en soi une tunique de culpabilité indirecte.
“C'est une situation que nous déplorons malheureusement. Mais la responsabilité incombe avant tout à nos dirigeants. Beaucoup de ces personnes se présentent comme membres des ONG ou structures oeuvrant dans l'humanitaire. Mais comment est-ce que l'État arrive à donner des agréments aux structures qui n'ont pas des moyens ne serait-ce que pour leur fonctionnement ?”, se questionne un Kinois.
Pauvreté et précarité des populations auxquelles s'ajoute l'irresponsabilité des autorités, autant de maux qu'évoquent les Congolais, pour essayer d'expliquer ce phénomène qui prend de plus en plus de l'ampleur.
“Que fait le ministère des Affaires sociales, Actions humanitaires et Solidarité nationale ? N'est-il pas au courant de cette situation ? C'est vraiment malheureux de voir s'installer, en plein jour et en pleine capitale, ces genres d'images qui démontrent que l'État est ailleurs sauf là où il devrait être”, regrette un étudiant croisé sur la place Assanef, dans la municipalité de Lingwala.
Aux avertis de conclure que même s'il y a des difficultés, un Gouvernement responsable, qui veut à tout prix le bien-être de sa population, devra ne serait-ce que faire le minimum, afin d'éviter de jeter de l'opprobre à toute la Nation.
Notons que la RDC -République démocratique du Congo- fait partie des cinq pays les plus pauvres du monde. 73,5 % des Congolais environ ont vécu avec moins de 2,15 dollars par jour en 2024. Environ une personne sur six vivant dans l'extrême pauvreté en Afrique subsaharienne vit en RDC.
En octobre 2024, la situation humanitaire et sociale de la RDC était au menu des échanges entre une délégation de l'UA -Union africaine- et la ministre des Affaires sociales, Actions humanitaires et Solidarité nationale.
“Au cours de ces échanges, nous avons fait un état des lieux de la situation humanitaire et sociale de la RDC. J’ai aussi présenté mon indignation face à cette crise prolongée et négligée”, avait déclaré Nathalie-Aziza Munana.
Pour autant, la situation ne semble pas encore s'améliorer.