Par Gloire Balolage
Dans une province du Nord-Kivu déjà éprouvée par plus de trois décennies de conflit, les journalistes se retrouvent pris au piège d’un environnement de travail devenu hostile et dangereux. Victimes collatérales d'une guerre d'agression persistante, ceux qui tiennent la plume et le micro dans les zones sous contrôle du M23 sont exposés à des risques accrus, tandis que ceux qui vivent dans la ville de Goma ne sont pas en reste face à une insécurité omniprésente.
En effet, alors que la ville se transforme en un terrain propice à toutes sortes d'insécurités, les journalistes, souvent résidant dans les quartiers populeux comme Karisimbi, font les frais d’un climat d’anxiété et de peur chaque jour.
La situation précaire à Goma est exacerbée par des actes de banditisme, qui frappent sans relâche. Des braquages fréquents et des incursions violentes dans les habitations n'épargnent pas les membres de la profession journalistique, qui se retrouvent en première ligne de cette insécurité grandissante. Comment dès lors ces reporters, chargés d’informer la population, sont-ils censés naviguer dans un contexte aussi tumultueux ?
Pour tenter d'éclaircir cette problématique, nous avons sollicité Tuver Wundi, directeur provincial de la RTNC et représentant de l’organisation "Journaliste en danger" (JED), qui a partagé son expertise sur la question. Dans une interview exclusive, il a souligné l'urgente nécessité pour les journalistes d’adopter des comportements adaptés face à ce climat de violence, mettant en avant la responsabilité individuelle de chaque reporter envers sa propre sécurité.
"Nous avons toujours dit que les journalistes travaillent dans un environnement hostile, et doivent savoir comment se comporter dans cet environnement là. Nous conseillons toujours aux journalistes de comprendre le contexte dans lequel ils travaillent, de maîtriser leur environnement", a-t-il déclaré.
Toutefois, il déplore que de nombreux journalistes semblent parfois négliger cette précaution cruciale, mettant ainsi leur vie en péril.
"Il faut que chacun prenne conscience de la situation qui l'entoure quand il quitte sa rédaction, ou qu'il se rend sur le terrain", insiste-t-il, invitant les journalistes à être vigilants et à adopter des stratégies adéquates pour se protéger. Cette auto-réflexion est d'autant plus décisive dans un contexte où la violence est devenue une réalité quotidienne, affectant non seulement les journalistes, mais tous les habitants de la région.
L’affaire la plus récente mettant en lumière ce climat d’insécurité est celle de Patience Ngorora, une journaliste de la Radio Kako FM, qui a vécu une expérience traumatisante. Le 11 novembre 2024, alors qu’elle quittait son travail, elle a été attaquée par des individus armés qui l'ont dépouillée de ses biens personnels, y compris de son équipement professionnel.
Cet incident illustre parfaitement l’urgence de la situation et l’angoisse persistante qui habite ceux qui se battent, jour après jour, pour informer le public.
Les conséquences de tels actes ne se limitent pas à des pertes matérielles. En effet, ils soulèvent de vives inquiétudes parmi les journalistes quant à leur sécurité et à la pérennité de leur métier dans un contexte aussi hostile. Comme l'indique Wundi, il est impératif que les journalistes prennent en main leur sécurité, afin de continuer à remplir leur rôle essentiel d’information dans la société.
Ainsi, face à cette insécurité croissante, la question de la protection des journalistes demeure un enjeu central pour l'avenir du journalisme en République démocratique du Congo, en particulier ceux qui vivent dans la province du Nord-Kivu, une province en quête désespérée de paix et de stabilité.