Menaces du M23 sur Goma : face à l'avancée de l'ennemi, faut-il encore attendre l'escarmouche pour réagir ?

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Quelques officiers militaires du mouvement du 23 mars lors de la remise du camp militaire de Rumangabo à la force régionale de l'EAC.
Quelques officiers militaires du mouvement du 23 mars lors de la remise du camp militaire de Rumangabo à la force régionale de l'EAC.

Par Prehoub Urprus

Plusieurs villages du territoire de Masisi sont encore tombés, samedi 03 février 2024, sous le contrôle de la rébellion du Mouvement du 23 Mars, dit M23. Il s'agit entre autres, de Shasha, Kirotshe, Kihindo, Kituva, Bukobati, Nyamubingwa et la route Sake-Minova, bloquant l'accès à la ville de Goma. Cette situation a contraint la majeure partie de la population, à prendre la poudre d'escampette, en vue de se mettre hors du danger.

Après cette nouvelle conquête, Corneille Nangaa, coordonnateur du mouvement politico-militaire AFC -Alliance Fleuve Congo-, est apparu dans une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux, montrant la cité de Sake comme leur nouvelle cible. Cette cité, faut-il préciser, constitue le dernier verrou sécuritaire pour conquérir le chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Visiblement, la coalition M23-RDF-UPDF-AFC veut à tout prix asphyxier la ville de Goma, afin d'imposer au Président de la République, Félix Tshisekedi, un dialogue qui, selon lui, «ils n'auront jamais.»

Goma enclavé, le M23 en petit prince

La menace du M23 sur la ville de Goma ne date pas d'aujourd'hui. Cette rébellion soutenue par le Rwanda, l'Ouganda et appuyée par l'AFC, tente plusieurs fois de conquérir cette ville touristique, à partir de Kibumba, dans le territoire de Nyiragongo, mais sans succès. L'ennemi a toujours rencontré un gros mûr des FARDC -Forces Armées de la République Démocratique du Congo- coalisées aux résistants patriotes des groupes d'autodéfense.

Se cherchant passage dans le territoire de Masisi, le M23 n'est jamais parvenu à atteindre Sake, une cité stratégique située à plus ou moins 27km à l'ouest de la ville de Goma. L'ennemi ne se contente que de l'occupation de Mushaki, Karuba, Mweso, Kitshanga et maintenant Shasha, ainsi que Kirotshe.

Par l'occupation de la route Sake-Minova, le M23 s'approche peu à peu de ses objectifs. Car, en asphyxiant la ville volcanique, même Kinshasa, la capitale de la RDC sera impactée. Tenez, les clés de toutes les portes qui mènent vers Goma sont entre les mains du M23, excepté la voie lacustre sur le Lac Kivu.

«Nous avons déjà coupé la liaison entre le Sud et le Nord-Kivu, la ville de Goma va tomber sans combat. Nous avons des armes pour abattre des drones, avions de chasse et qui peuvent nous permettre de capturer Kinshasa», se vante Oscar Balinda, l'un des communicateurs de la coalition M23-RDF-UPDF-AFC.

Gouvernement congolais, bon parleur mais mauvais faiseur

Des interrogations envahissent le chef de la population nord-kivutienne quant à la réalité du terrain, et les fermes décisions du Gouvernement Congolais. Lors de sa campagne électorale, le Chef de l'État avait déclaré sur les ondes de Top Congo, «en cas de la moindre escarmouche, ... je vais réunir les deux Chambres en congrès. Je vais demander l'autorisation de déclarer la guerre au Rwanda.» 

Ces propos ont été précédés par ceux du ministre des Affaires étrangères, Christophe Lutundula, je cite : «si jamais, même par hasard, une balle tombait sur Goma, sachez que nous allons réagir dans les heures qui suivront», fin de citation.

En effet, pour certains analystes, c'est comme si les décideurs congolais parlent pour amuser la galerie. Peut-être «l'escarmouche n'est pas encore arrivée», pensent-ils, même si une bombe larguée par le M23 est déjà tombée sur Goma, entraînant des pertes humaines et matérielles à Mugunga. En plus de nombreuses familles qui passent nuit à la belle étoile, cela ne paraît-il pas suffisant pour que le Gouvernement congolais prenne des engagements fermes, pour finir avec cette guerre imposée par certains de ses pays voisins, et restaurer la dignité de son peuple?

FARDC victimes de la diplomatie de son gouvernement ?

Face à la montée en puissance du M23, les FARDC et la Monusco avaient lancé des opérations «Springboks». Ces opérations en cours, ont pour but de mettre la ville de Goma et la cité de Sake hors du danger des rebelles. Les opérateurs (Monusco Ndlr) eux-mêmes subissent les violences de leurs antagonistes. Un hélicoptère de la mission onusienne a été tiré dessus par le M23, vendredi 02 février, dans le territoire de Masisi.

La RDC serait victime de sa propre diplomatie. Tous les partenaires de l'Armée congolaise, dans cette guerre d'agression rwandaise, jouent à l'hypocrisie. C'est à l'occurrence l'EAC, la SADC et les casques bleus.

Si vraiment la Mission d'Observation des Nations-Unies pour la Stabilisation de la République Démocratique du Congo, veut aider les Forces loyalistes, elle doit décider de trouver la solution à la vie chère que mènent ou vont mener les habitants de Goma, à la suite de l'enclavement de leur ville. Sinon, les conséquences sont énormes. Toutefois, il est inconcevable qu'aujourd'hui, pour arriver à Beni ou Butembo, à partir de Goma, si pas l'avion, il faut traverser le Rwanda et l'Ouganda (pays agresseurs).

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Lundi 5 février 2024 - 14:12