![Sourires échangés entre un officier de l’Armée ougandaise et Willy Ngoma, porte-parole militaire du M23 [photo d’illustration]](/sites/default/files/styles/media_interne_1280x720/public/2025-07/IMG-20250703-WA0005.jpg?itok=mdYiHImn)
Par le Rédaction
Alors que le Rwanda cristallise l’attention dans la guerre à l’Est de la RDC, un autre acteur majeur émerge désormais au cœur de l’agression. Il s’agit de l’Ouganda, le pays de Yoweri Kaguta Museveni. Officiellement engagé aux côtés des FARDC contre les ADF, Kampala est accusé, dans un rapport explosif des experts de l’ONU, de jouer un rôle ambigu voire déstabilisateur dans l’extension du conflit à l’Est du Congo, notamment en Ituri.
Selon ce rapport, les troupes ougandaises de l’UPDF ont été déployées en janvier 2025 dans les territoires de Mahagi et Djugu sans notification préalable ni accord officiel avec Kinshasa, violant ainsi la souveraineté congolaise. Cette présence étrangère non coordonnée a, selon les experts onusiens, aggravé les tensions intercommunautaires dans une région déjà marquée par les conflits ethniques et les exactions armées.
Plus troublant encore, les unités de l’UPDF se sont positionnées à proximité des zones contrôlées par la coalition rebelle du M23-AFC, faisant planer des soupçons de collusion tacite. Ce déploiement s’inscrit dans un contexte de militarisation régionale, où frontières et alliances se brouillent dangereusement.
Le rapport mentionne également la présence en Ouganda de plusieurs chefs de guerre congolais sous sanctions internationales, dont Thomas Lubanga Dyilo et Innocent Kaina. Ces anciens miliciens, libérés de prison, opèrent depuis Kampala, où ils recrutent et forment de nouveaux combattants. Ils ont établi, avec l’appui d’Yves Khawa Panga Mandro, une base logistique à Hoima, dans l’ouest de l’Ouganda, utilisée pour acheminer armes et miliciens vers l’Ituri.
Le 11 mars 2025, Lubanga a même annoncé la création d’un nouveau mouvement rebelle, la CRP -Convention pour la Révolution Populaire–, depuis la capitale ougandaise. Bintou Keita, cheffe de la Monusco, a dénoncé cette initiative comme un facteur aggravant de l’instabilité dans la région.
Malgré ces éléments, Kinshasa maintient une coopération militaire avec Kampala dans le cadre de l’opération conjointe Shujaa, officiellement destinée à combattre les ADF. Le 20 juin 2025, cette alliance a été renforcée avec l’extension des opérations à plusieurs territoires de l’Ituri, dont ceux où l’UPDF s’était déployée unilatéralement quelques mois plus tôt.
Derrière cette collaboration, plusieurs analystes pointent une logique d’influence géostratégique et de prédation économique. L’Ouganda serait intéressé par le contrôle indirect des ressources naturelles congolaises, notamment l’or, dont une grande partie transite illégalement par son territoire. En 2023, l’Ouganda a exporté pour 2,7 milliards de dollars d’or, un volume jugé suspect par plusieurs ONG, dont Swissaid.
Face à cette situation, Kinshasa reste sur la retenue. Si la diplomatie congolaise admet sa "consternation" face au rôle trouble de Kampala, aucune rupture n’a été actée. "On ne peut pas mener deux guerres à la fois", indiquent des hauts responsables congolais, ajoutant que le dialogue reste, pour l’instant, privilégié.
Mais cette stratégie d’équilibre pourrait s’avérer coûteuse. Car, au-delà des discours, le rapport de l’ONU met en lumière une réalité préoccupante : l’Ouganda, en entretenant des liens discrets avec les réseaux rebelles, contribue à alimenter un conflit qui dévaste l’Est du Congo. À l’heure où la Communauté internationale scrute l’implication du Rwanda, le rôle de Kampala mérite une attention accrue.