Dilemme cornélien : Kinshasa entre cessez-le-feu sur papier et l'avancée sur terrain de l’armée rwandaise, M23-AFC !

Catégorie
Image
Photo d'illustration
Photo d'illustration

Par la Rédaction 

La situation dans l’Est de la RDC -République démocratique du Congo- continue de s’enliser dans un cycle infernal de violences et d’incertitudes politiques. Ce 20 mars 2025, plusieurs événements viennent rappeler à quel point ce conflit dépasse les simples affrontements armés : il s’agit d’une guerre géopolitique, économique et diplomatique, où chaque acteur joue sa carte avec des intérêts bien définis.

 

Walikale, un verrou stratégique sous contrôle de l’armée rwandaise, M23-AFC

La prise de Walikale-Centre par les combattants de l’Armée rwandaise-M23-AFC, le 19 mars 2025, marque une nouvelle étape préoccupante. C’est, en fait, une grande agglomération située à un carrefour reliant quatre provinces de l’Est de la RDC, dont le Nord-Kivu, le Sud-Kivu, le Maniema et la Tshopo. Cette cité est, non seulement un point névralgique sur le plan militaire, mais aussi un axe essentiel pour le commerce et l’exploitation des ressources minières.

Avec cette avancée, l’emprise de l’Armée rwandaise-M23-AFC sur la région se renforce encore davantage, rendant toute reconquête par l’Armée congolaise de plus en plus hypothétique. L’occupation de cette cité ouvre aussi la route aux rebelles vers Kisangani, à une distance de plus ou moins 444 kilomètres. 

Des négociations qui ont du mal à convaincre

Alors que la situation militaire évolue sur le terrain en faveur de la rébellion et ses partenaires, la diplomatie suit son propre tempo. Le Président Félix Tshisekedi se dit prêt à de nouvelles discussions avec son homologue Paul Kagame. Mais après des années de tensions et de tentatives de médiation avortées, que peut-on encore espérer d’un dialogue avec Kigali ? L’expérience a montré que ces pourparlers servent souvent d’écran de fumée, pendant que les rapports des forces militaires et économiques continuent de se jouer en coulisses.

D’ailleurs, les déclarations du chef de RDF-M23-AFC, Corneille Nangaa à Reuters, viennent jeter un froid sur les initiatives internationales. En rejetant la médiation du Qatar et en affirmant que la population "bloquerait" un éventuel accord minier entre Kinshasa et Washington, il envoie un message clair : les réalités du terrain ne se décident ni dans les bureaux feutrés des chancelleries, ni à Doha, mais bien dans la dynamique des combats et du contrôle des ressources.

Macron et l’illusion d’un processus de paix

Face à ce chaos, Emmanuel Macron renouvelle son soutien aux efforts des chefs religieux congolais pour la paix. Une posture louable, mais qui révèle surtout l’impuissance de la Communauté internationale face à une guerre qui n’a jamais cessé d’être alimentée par des intérêts économiques et géostratégiques bien établis.

Pendant ce temps, sur le terrain, les populations civiles continuent de payer le prix fort. Déplacements forcés, pillages, insécurité chronique, ... la guerre dans l’Est du Congo-Kinshasa n’est plus seulement un conflit armé, c’est aussi un mode de gouvernance imposé par la force et l’économie de guerre.

Faut-il encore croire aux négociations, ou bien la RDC est-elle condamnée à voir son destin dicté par ceux qui, fusil en main ou en costume-cravate, façonnent son avenir à leur profit ?

Les négociations de Luanda, énième échec

L’échec des pourparlers de Luanda, qui visaient à désamorcer la crise entre Kinshasa et Kigali via le M23, démontre une chose: "les négociations ne fonctionnent que si les parties ont un réel intérêt à la paix." Or, dans ce conflit, chaque acteur joue une stratégie bien rodée. Le Rwanda ne semble pas prêt à lâcher du terrain sans garanties solides sur ses intérêts économiques et sécuritaires, tandis que Kinshasa se trouve piégé entre la pression internationale et "l’incapacité militaire" à inverser la tendance sur le terrain.

Doha, le théâtre des illusions

Le même jour de ce nouvel échec de Luanda, Félix Tshisekedi et Paul Kagame se retrouvaient à Doha, au Qatar, dans ce qui ressemblait davantage à une tentative de sauver la face qu’à une réelle volonté d’aboutir à un compromis. Là encore, les discussions n’ont rien donné de concret, illustrant la fracture profonde entre les discours diplomatiques et les actions militaires qui se poursuivent sans relâche dans l’Est du pays. D’autant plus que, c'est au lendemain de cette rencontre qui avait accouché "un cessez-le-feu inconditionnel", que le chef-lieu du territoire de Walikale a été occupé par l’Armée rwandaise par le biais de ses supplétifs de la coalition M23-AFC. 

Un lourd tribut pour la population congolaise

Pendant que ces négociations s’enlisent, la guerre du M23-AFC [qui dure depuis 2021] continue de ravager des régions entières. Des milliers de morts, des millions de déplacés, des villages rayés de la carte et une économie locale anéantie. Bref, c’est la population est-congolaise qui paie le prix du temps que prend cette guerre.

Alors, faut-il encore croire aux négociations ? L’histoire récente nous enseigne que tant que le rapport des forces ne changera pas sur le terrain, ces discussions resteront "des scénarios écrits d’avance", avec toujours le même dénouement : l’enlisement du conflit au profit de ceux qui en tirent les bénéfices.

Jeudi 20 mars 2025 - 20:54