
Par Edmond Izuba
Malgré que l’eau ait coulé sous les ponts, la Banque mondiale ne faiblit pas. L’institution financière internationale tient mordicus sur le retour aux affaires de Fabrice Lusinde, suspendu de ses fonctions de directeur général de la SNEL sur recommandation de l’Assemblée nationale qui l’accuse de mégestion.
Porté à la tête de cette entreprise au terme d’un concours organisé par le Comité de pilotage de la réforme des entreprises du portefeuille de l’Etat (COPIREP), Lusinde a fait du temps au sein de cette structure du portefeuille de l’Etat, vit dans la mamelle de la Banque mondiale, en tant que responsable de la cellule de passation des marchés.
Lauréat de ce concours, organisé pour rencontrer l’une des conditions fixées par des partenaires financiers, dont cette institution de Bretton Woods, avant d’injecter de l’argent dans le secteur de l’électricité et autre, Lusinde passe pour le protégé de la représentante de la Banque mondiale en RDC (Ndlr: Directrice-Pays). La ouest africaine se fait accompagner du ministre congolais des finances, Nicolas Kazadi, pris dans sa casquette de l’interlocuteur valable de la Banque mondiale dans un pays.
Des sources concordantes ont confirmé à Opinion-Info.cd que cette démarche est en phase de créer collusion et confusion entre les institutions du pays, notamment le parlement, le gouvernement et le Président de la République.
Certes Nicolas Kazadi, appuyé par Korotoumou (Koro) Ouattara, a eu à mener des lobbys très solides pour faire aboutir leur processus, c’est-à-dire retourner Fabrice Lusinde à sa case de Directeur général de la Société nationale de l’électricité (SNEL), société étatique dont la totalité de son financement provient de la Banque mondiale, malgré les recommandations de l’Assemblée nationale telles qu’exécutées par le gouvernement.
Ces lobbys auraient déjà séduit le Chef de l’Etat, qui est à deux doigts de rétablir Lusinde, avec pour conséquence inévitable : l’humiliation de l’Assemblée nationale qui a préalablement procédé à un digne contrôle parlementaire avant de constater le DG suspendu a fait preuve « d’incompétence et d’inefficacité » dans sa gestion de cette entreprise. De quoi recommander sa révocation. La même procédure, déclenchée par la Chambre basse, avait conduit à la déchéance d’un ministre de l’Economie en 2022.
Ces inquiétudes infondées de la banque mondiale aux yeux du parlement !
La Banque mondiale ne décolère toujours pas. Elle continue de sommer l’Assemblée nationale à justifier ses recommandations ayant abouti à la suspension de son pion, Fabrice Lusinde. Plusieurs semaines après les premiers entretiens avec Christophe Mboso, président de l’Assemblée nationale, le duo Kazadi et Korotoumou sont revenus à la charge ce mardi 21 juin 2023. Ils ont en vain tenté, au cours de cette audience, de convaincre le speaker.
Dès l’entame des discussions, ont rapporté nos sources, la Banque mondiale aurait semblé faire comprendre au président de la chambre basse du parlement que la personne de Lusinde était la garantie de bonnes relations avec son institution, avant d’estimer qu’un bénéficiaire de l’ordonnance présidentielle ne pouvait être facilement défenestré sur base des simples recommandations de l’Assemblée nationale. Korotoumou ne s’est pas arrêtée-là. Elle aurait également dénoncé que la décision de suspension de Lusinde a été prise par un membre du gouvernement sans aval préalable du Premier ministre.
C’en est suivi d’une cinglante réaction de Mboso, d'après les mêmes sources, qui n’a pas toléré ce forcing sans précédent sur le pouvoir parlementaire, qui n’a fait que respecter les us et coutumes de cette institution. Avant de marteler sur le pouvoir des députés de sanctionner aussi les bénéficiaires des ordonnances présidentielles après un contrôle « rigoureux », Mboso a voulu comprendre si la Banque Mondiale a signé les accords avec le pays (RDC) ou avec l’individu Lusinde ? Il a appelé à la sagesse afin que la Banque mondiale n’égratigne pas les textes légaux en vigueur au pays de Lumumba.
Des sources proches de la Banque Mondiale ont renseigné à la rédaction que cette immixtion Korotoumou (Koro) Ouattara emboitée par Nicolas Kazadi risque de la discréditer.
«Quand il y a immixtion d’un agent de la Banque mondiale pour la cause d’un tiers pour garantir un financement, il court le risque d’un licenciement », a déclaré notre source.
Le chef de l’Etat, qui serait déjà d’accord pour le retour de Lusinde à la tête de la SNEL, cherche-t-il à fouler au pied la révocation telle que sollicitée par les 500 députés ? Quelle image pour la séparation des pouvoirs : assemblée a décidé, le gouvernement a exécuté et le chef de l’Etat refuse d’obtempérer ? Il y a-t-il d’autres mandataires publics plus précieux que d’autres ? Les députés seraient déjà jetés comme des papiers usés après être utilisés par le chef de l’Etat ? Est-ce que ce climat va favoriser la bonne tenue des élections ?
Dans son rôle d’observatrice, la Banque mondiale ne gère pas la Société Nationale de l’Electricité (SNEL) qui est une émanation des institutions du pays. La Banque mondiale est en appui de trois établissements publics, à savoir : la Regideso, la Snel et le Foner depuis 2015. Sur invitation de la RDC à qui elle vient en aide pour répondre à un besoin, la Banque débourse ses millions pour couvrir plusieurs urgentes pour assurer la fourniture en eau et électricité à partir du transport, la distribution jusqu’à la production de ces deux denrées. Il en est de même pour l’entretien des routes nationales.