
Par Patrick Kitoko
La RDC -République démocratique du Congo- est confrontée, chaque année, à de sérieux problèmes d'inondations dévastatrices, aggravées par une urbanisation anarchique, un manque d'infrastructures de drainage ainsi qu'une pression démographique considérable. Des inondations qui provoquent d'importants dégâts humains et matériels, laissant de nombreuses familles sans toit. Du coup, le relogement des sinistrés s'impose et devient alors un défi majeur liant problématique sociale, politique et urbanistique.
Selon l'urbaniste Fiston Ilangi, l'absence d'une politique urbanistique adaptée demeure le souci majeur dans la mise en place d'une démarche de relogement, d'autant plus que le contexte urbain reste fragile.
“Le premier défi du relogement à Kinshasa réside dans l'absence d'une politique urbaine cohérente et anticipative. La plupart des sinistrés occupaient des zones à risques, souvent de manière informelle et sans titre foncier, ce qui complique toute indemnisation ou réinstallation légale. De plus, les rares sites de relogement proposés sont souvent éloignés des zones d'activités économiques, ce qui dissuade de nombreuses familles à y déménager, de peur de perdre leur moyen de subsistance”, pense cet enseignant et chercheur.
Le mouvement de la population a toujours eu un impact dans le comportement, voire dans l'agir humain. D'où, pour un relogement des sinistrés, les enjeux sociaux et humains doivent impérativement être prises en compte.
“Le relogement ne peut être abordé comme un simple transfert de populations”, soutient-il, avant d'ajouter : “Il engage des questions de dignité humaine, de cohésion sociale et d'équité territoriale. Le déplacement de familles sans accompagnement social adéquat peut engendrer de nouveaux problèmes d'isolement, d'insécurité, de déscolarisation des enfants, de précarité accrue. Il est donc crucial d'associer toute stratégie de relogement à des programmes d'accompagnement social, de formation et d'intégration.”
Dans tout cela, il est impérieux que l'État ainsi que les autorités urbaines implémentent un leadership fort et transparent dans leur rôle de la gouvernance et dans la planification des actions. Une démarche qui implique la «clarification du statut juridique des zones inondables, d'appliquer strictement les règlements d'urbanisme et d'anticiper les risques par des plans de prévention.»
“Le relogement des sinistrés doit s'inscrire dans une vision globale de la ville. Cela suppose de concevoir des écoquartiers résilients, accessibles, bien desservis et dotés d'équipements collectifs. Les projets doivent être participatifs, incluant les populations concernées dans le processus de décision. Il s'agit aussi de revaloriser les terrains délaissés, de renforcer les infrastructures de drainage, et, surtout, de préserver les zones naturelles comme amortisseurs écologiques”, propose l'urbaniste Fiston Ilangi.
Soulignons que ces cas des inondations récurrentes viennent mettre à nue la fragilité structurelle de l'aménagement urbain en RDC. Cette politique de relogement des sinistrés, si elle est bien encadrée, pourrait se révéler comme une opportunité pour repenser les villes de manière durable, inclusive et résiliente.