Édito : Fridolin Ambongo, ce prophète que Rome n’a pas voulu écouter !

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Le Cardinal Fridolin Ambongo, Archevêque de l’Église Catholique à Kinshasa
Le Cardinal Fridolin Ambongo, Archevêque de l’Église Catholique à Kinshasa

Par Prehoub Urprus

Il ne suffisait pas d’être cardinal pour prétendre à la papauté. Il fallait aussi, semble-t-il, savoir taire certaines vérités. À l’heure où l’Église catholique vient de se doter d’un nouveau souverain pontife - /le Pape Léon XIV-, l’Afrique, une fois de plus, regarde depuis les marges une décision prise sans elle, ou, du moins, sans l’un de ses plus dignes représentants : le cardinal congolais Fridolin Ambongo.

Ambongo n’a pourtant rien d’un inconnu. Archevêque de Kinshasa, vice-président du Réseau des évêques pour la forêt du bassin du Congo, voix forte et sans compromis sur les injustices sociales, les conflits armés et les dérives politiques sur le continent, il incarne cette figure prophétique que certains appellent de leurs vœux… sauf, visiblement, lorsqu’il s’agit de confier la barque de Pierre.

L’homme dérange, justement parce qu’il parle. Parce qu’il dénonce. Parce qu’il ose dire que l’Église ne peut rester silencieuse face à l’exploitation des peuples, au pillage des ressources, à la complicité silencieuse de certaines puissances dans la tragédie congolaise. Cette parole ferme, ce refus du compromis face à l’inacceptable, en font un leader moral. Mais aux yeux de certains, cela le rend aussi "trop engagé", trop "politique" pour l’universalité sereine qu’on attend d’un pape.

Rome, dans sa sagesse ou dans ses peurs, a donc choisi un autre visage. Plus conciliant ? Plus consensuel ? L’histoire tranchera. Mais ce que l’on retiendra, c’est qu’en écartant Ambongo, l’Église universelle a peut-être manqué l’occasion d’écouter ceux qui vivent la foi dans les périphéries, au cœur même des souffrances du monde.

Ce n’est pas un échec pour le cardinal Ambongo. C’est un signal adressé à tous ceux qui croient que la vérité, lorsqu’elle dérange, doit être domestiquée. Non. Elle doit être proclamée, même depuis les marges.

L’Afrique continue de croire. Et les prophètes, eux, n’attendent pas les couronnes pour dire ce qui doit être dit.

Vendredi 9 mai 2025 - 07:25