RDC - Kisangani: La FIDH, l’OMCT et l’Observatoire exigent la libération du militant Jedidia Mabela 

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Le militant de la lucha Jedidia Mabela [photo d'illustration]
Le militant de la lucha Jedidia Mabela [photo d'illustration]

Par Gloire Balolage 

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains, en partenariat entre la FIDH- Fédération internationale pour les droits humains- et l’OMCT -Organisation mondiale contre la torture- lance un appel urgent aux autorités congolaises pour la libération du militant Jedidia Mabela, défenseur des droits humains et militant du mouvement citoyen LUCHA.

Le 1er octobre 2025, Jedidia Mabela, également directeur exécutif de l’organisation Actions pour la justice, le développement et les droits humains (AJDDH), a été interpellé dans son bureau à Kisangani par la Police nationale congolaise. Présenté brièvement devant le Tribunal de paix de Kisangani Makiso, ce dernier a été placé sous mandat de dépôt et conduit à la prison centrale de la ville, où il demeure incarcéré.

Dès le lendemain, le 2 octobre, le tribunal l’a condamné à six mois de prison ferme pour "propagation de faux bruits" et "imputation dommageable", en lien avec des publications critiques sur les réseaux sociaux. Il y dénonçait le financement de deux concerts de la chanteuse Rebo à Kisangani par le gouvernement provincial de la Tshopo, dans un contexte local marqué par un manque criant d’infrastructures de base : électricité, eau potable, routes. Une amende de 1 500 000 francs congolais (environ 500 euros) lui a également été infligée, au bénéfice du gouverneur de la province.

Cette condamnation survient dans un climat de tensions croissantes entre la société civile et les autorités provinciales. La veille de son arrestation, le 30 septembre, Jedidia Mabela participait à un sit-in pacifique devant l’Assemblée provinciale de la Tshopo, aux côtés d’autres militants de LUCHA et du mouvement Filimbi. Cette manifestation, organisée pour dénoncer la mauvaise gouvernance et les détournements présumés de fonds publics, a été violemment dispersée par la police, causant des blessés parmi les manifestants, notamment Lambert Bakonda.

L’Observatoire dénonce une répression grandissante contre les défenseur·es des droits humains en RDC, particulièrement depuis la réélection du président Félix Tshisekedi en décembre 2023. Selon l’organisation, la situation s’est fortement détériorée en 2025, dans un contexte de guerre à l’Est du pays entre les forces armées congolaises (FARDC) et le mouvement rebelle M23, soutenu par l’armée rwandaise selon les Nations unies.

 Dans ce climat tendu, tant les groupes armés que les autorités congolaises s’en prennent aux voix critiques, réduisant de fait l’espace civique dans le pays. Un rapport des Nations unies qualifie cette situation de "suppression de l’espace civique". Face à cette situation préoccupante, l’Observatoire demande instamment au gouvernement congolais de :

Garantir la sécurité physique et psychologique de Jedidia Mabela ainsi que celle de tous les défenseur·es des droits humains en RDC ; Libérer immédiatement et sans condition M. Mabela ainsi que toute personne détenue arbitrairement pour ses activités de défense des droits humains ;

Mettre un terme à tout harcèlement, y compris judiciaire, visant les défenseur·es des droits humains ; Respecter les droits à la liberté d’expression, tels que garantis par les instruments internationaux comme la Charte africaine des droits de l’Homme et l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Appliquer rigoureusement les dispositions de la loi congolaise n° 23/027 du 15 juin 2023, notamment les articles 13, 14, 15 et 18, qui protègent le droit d’informer sur les violations des droits humains et sanctionnent ceux qui portent atteinte aux défenseur·es.

Le cas de Jedidia Mabela envoie un signal préoccupant quant à l’état de la démocratie et de l’état de droit en RDC. La criminalisation des opinions critiques et la répression des manifestations pacifiques rappellent les défis majeurs auxquels fait face la société civile congolaise, pourtant essentielle dans la lutte contre la corruption, les abus de pouvoir et les atteintes aux droits fondamentaux.

L’Observatoire appelle à une mobilisation urgente tant au niveau national qu’international pour que cessent les attaques contre ceux qui défendent les droits humains en République démocratique du Congo.

Mercredi 8 octobre 2025 - 12:35