![Siège de la Centrale Électorale Nationale Indépendante CENI RDC [Photo d'illustration]](/sites/default/files/styles/media_interne_1280x720/public/2023-12/WhatsApp%20Image%202023-12-15%20at%2010.58.08.jpeg?itok=cShCTMCP)
Par Bijou NDJODJI BATEKO
Au lendemain de la publication, par la Centrale électorale, des résultats provisoires des Législatives du 20 décembre dernier, des contestations ont été enregistrées par milliers, tant du côté de l'opposition que du pouvoir. Il y a eu plus des mécontents, des lésés, des non convaincus qui n'ont pas tardé à contester ces résultats provisoires de la CENI -Commission électorale nationale indépendante-.Aussi curieux que cela puisse paraître, c'est le cas de ceux du pouvoir, de l'USN -Union sacrée de la Nation-, dont Gecko Beya des Forces du Progrès et les militants du MLC -Mouvement de Libération du Congo-. À la* *base de cette confusion, la non maîtrise de la notion de calcul du seuil d'éligibilité et du quotient électoral.* *Pour apporter sa pierre dans l'apaisement des esprits, Garry Sakata, député national et professeur* *d'universités, explique, de manière lapidaire et limpide, la notion et le calcul du seuil d'éligibilité* *et du quotient électoral, ainsi que leur importance dans l'assainissement de l'espace politique, par la* *disparition des partis non représentatifs à l'échelle nationale. "Le quotient électoral est déterminé par circonscription électorale. Il n'est pas national.", a indiqué le professeur, qui, par ailleurs, s'est appesanti sur la différence entre le calcul du quotient électoral qui permet de déterminer le nombre de sièges par circonscription, et le quotient électoral qui confère au parti ou regroupement politique, un ou plusieurs sièges. Ci-dessous, in extenso, l'interview du professeur Garry Sakata.*
*Opinion-Info.cd : A quoi sert le seuil d'éligibilité ?
Garry Sakata : L'importance de ce seuil est d'ojrdre socio-politique. Le législateur a voulu que les députés qui siègent, soient issus des partis ou regroupements politiques qui sont bien implantés sur l'ensemble du territoire national, de sorte que l'élu qui en ressorte soit un vrai représentant du peuple congolais entier, et non pas de sa seule circonscription. On évite ainsi des partis ou regroupements politiques, qui ne seraient représentés que dans un coin de la République. L'idée principale est la représentativité au niveau national.
*''''''OIC : Quel est le pourcentage requis du seuil
GS : Le seuil concerne les Législatives , les provinciales et les municipales. Pas la présidentielle.
Un pourcentage (1%) au niveau des Législatives, trois pourcentages (3%) aux provinciales et dix pourcentages (10%) aux municipales.
OIC : Comment calcule-t-on le seuil?
GS : Pour la députation nationale, le calcul se fait en tenant compte du nombre total des suffrages valablement exprimés sur l'ensemble du territoire national. On y exclut donc les suffrages invalidés et les bulletins nuls.
À titre illustratif, en 2023, le nombre total des votants est de 18.000.0000 des voix. Lorsqu'on soustrait de ce nombre les 600.000 voix des bulletins invalidés et nuls, on a 17.400.000 qui représentent les suffrages valablement exprimés. Le 1% du seuil d'éligibilité est donc calculé sur base de 17.400.000 voix, et non pas sur 18millions.
Ce seuil sera donc de 174.000 voix.
Ainsi, chaque parti ou regroupement politique doit atteindre ce minimum, pour être admis parmi ceux qui devront avoir des sièges. En deçà, le parti ou le regroupement politique est d'office exclu.
S'agissant de la députation provinciale, le calcul se fait en tenant compte des suffrages valablement exprimés sur l'ensemble de la province concernée.
À titre d'exemple, la province du Kwilu a 900.000 suffrages valablement exprimés. Le seuil d'éligibilité sera donc de 27.000 voix pour chaque parti ou regroupement politique.
En deçà de ces chiffres, le parti ou le regroupement politique est éliminé.
En ce qui concerne les municipales, le calcul se fait sur base des suffrages valablement exprimés sur l'ensemble de la ville ou du territoire concerné. Si une ville ou un territoire a 10.000 suffrages valables, par exemple, le seuil minimum à atteindre sera de 1.000 voix, pour être admis au partage des sièges. En deçà, le parti ou le regroupement politique est écarté.
Toutefois, il y a trois aspects importants à souligner.
Premièrement, il est des cas où un parti ou regroupement politique n'atteint pas le seuil, mais celui-ci bénéficie quand même d'un siège. C'est lorsque l'un des candidats obtient plus de 50% des suffrages exprimés dans sa circonscription électorale.
C'est le cas de la candidate Miel Blandine, par exemple, dont le regroupement politique n'a pas atteint le seuil d'éligibilité, mais qui sera déclarée élue dans la circonscription électorale de Bagata (100.000 suffrages valablement exprimés), pour avoir obtenu, à elle seule, 52.000 voix.
Deuxièmement, le fait pour un parti ou regroupement politique d'atteindre le seuil, lui confère le statut d'éligibilité à obtenir le siège, mais ne lui confère pas directement un siège. Ainsi, un parti ou regroupement politique peut atteindre le seuil, mais ne gagne aucun siège.
Troisièmement, un parti ou regroupement politique peut atteindre le seuil au niveau national, et ne pas l'atteindre au niveau provincial ni municipal, ou vice-versa. De même, un parti ou regroupement politique peut atteindre le seuil dans telle province ou ville, et ne pas l'atteindre dans telle autre.
*OIC : Comment se calcule le quotient électoral ?*
GS : Il faut faire une différence entre le calcul du quotient électoral, qui permet de déterminer le nombre de sièges par circonscription, et le quotient électoral qui confère au parti ou regroupement politique un ou plusieurs sièges.
Analysons le dernier cas.
Le quotient électoral est déterminé par circonscription électorale. Il n'est pas national.
Il tient compte de deux éléments, à savoir, le nombre de suffrages valablement exprimés, d'une part, et, de l'autre, le nombre de sièges de la circonscription.
Pour bien l'illustrer, prenons le cas de la circonscription de Ngandajika, qui a 90.000 suffrages et 3 sièges à pourvoir.
Le quotient électoral pour Ngandajika est donc de 30.000 voix, obtenus de la division de 90.000 suffrages exprimés par 3 sièges à pourvoir.
Ce qui veut dire que pour qu'un parti ou un regroupement politique prétende avoir 2 sièges, il faut qu'il ait d'abord obtenu 30.000 voix, et que son reste, c'est-à-dire son surplus au-delà de 30.000, soit supérieur à tous les autres parti ou regroupement politique.
Il sied de noter que, sauf pour les indépendants, le nombre de voix à prendre en compte, ce ne sont pas les voix d'un candidat, mais la sommation des voix de tous les candidats du même parti ou regroupement politique.
Exemple:
Liste X
Candidat A: 90 voix
Candidat B: 6 voix
Candidat C: 4
Total de la liste : 100 voix
Liste Y
Candidat A: 40 voix
Candidat B: 35 voix
Candidat C: 30 voix
Total : 105 voix
C'est la liste Y qui prendra le siège, et non pas X, malgré le nombre élevé des voix du premier de sa liste.
*OIC : Qu'en est-il des candidats indépendants ?*
GS : La Constitution et la Loi électorale reconnaissent aux citoyens, le droit de postuler comme indépendant. Il ne se pose aucun problème dans les circonscriptions à siège unique, où leur sort ne diffère pas de ceux des candidats des partis ou regroupements politiques. Mais le candidat indépendant a un désavantage dans les circonscriptions à plusieurs sièges, parce que l'on ne considère que ses voix, alors que les candidats des partis ou regroupements politiques additionnent les leurs.