Édito - Guerre d’agression rwandaise en RDC : La presse étouffée entre deux feux !

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Par Prehoub Urprus 

 Informer dans le Grand Kivu est, désormais, une mission à haut risque. L'objectivité et l'impartialité du journaliste dans le traitement de l'information à mettre à la disposition du public sont sérieusement mises à l'épreuve. Entre les pressions rebelles de ne publier que l'information propagandiste de la rébellion et les interdictions gouvernementales formelles de diffuser tout ce qui est lié à la coalition rebelle, le journaliste, pris entre deux feux et loin d'être médiateur entre l'événement et le public, ne sait plus rendre compte de la réalité. Au quotidien, écartelé entre la passion d'informer et l'instinct de survie grâce à son métier duquel il tire son revenu, le journaliste marche sur les œufs dans les zones sous contrôle de l'Armée rwandaise et ses supplétifs du M23-AFC. Dans ce contexte des zones contrôlées par les agresseurs, où seule la loi du plus fort est la meilleure, il est plus qu'urgent que la Communauté internationale intervienne, pour assurer la protection du journaliste et la liberté d'expression, afin que le monde entier sache ce qui s'y passe. Agir autrement, c'est être complice de la descente aux enfers du Grand Kivu.

Dans l'est de la RDC -République démocratique du Congo-, le métier de journaliste est devenu un exercice de haute voltige. Coincés entre la censure des rebelles de la coalition M23-AFC soutenus par le Rwanda et les restrictions imposées par Kinshasa, les professionnels de l'information naviguent en eaux troubles, cherchant à informer sans compromettre leur sécurité.

Un travail de funambule

D'un côté, les rebelles du M23-AFC exercent une censure stricte, interdisant toute information contre-productive à leur propagande. De l'autre, Kinshasa impose un black-out médiatique sur les activités de ce groupe armé, privant la population d'une information cruciale. Les journalistes se retrouvent ainsi pris en étau, contraints de jongler avec les interdits et les pressions.

"C’est un travail de funambule, où chaque pas peut être fatal", confie un journaliste de Goma, sous couvert d’anonymat. Cette situation est, pourtant, une violation flagrante du droit à l'information. Les populations ont besoin de savoir ce qui se passe, de comprendre les enjeux, pour pouvoir se protéger et agir.

Un contexte de guerre complexe

Comme l'a souligné Jean-Claude Guillebaud dans son ouvrage «Le Principe d'humanité», paru en 2001, les journalistes en zone de conflit sont confrontés à des dilemmes éthiques constants. Ils doivent rendre compte de la réalité, sans pour autant mettre en danger les populations civiles ni compromettre les opérations militaires.

Dans le cas des provinces du Nord et Sud-Kivu, la situation est particulièrement complexe. Les rebelles de la coalition M23-AFC exercent une pression constante sur les médias, interdisant toute information contraire à l'idéologie de la rébellion. Parallèlement, Kinshasa, au nom de la sécurité nationale, impose des restrictions sur la diffusion d'informations jugées propagandistes de la coalition rebelle.

Les défis du journalisme en zone de conflit

Selon Patrick Charaudeau, dans son ouvrage «Le Discours d'information médiatique», publié en 1997, le journaliste doit être un médiateur entre l'événement et le public. Mais en zone de conflit, cette médiation est souvent entravée par les acteurs armés, qui cherchent à contrôler l'information.

Les journalistes locaux, qui connaissent le terrain et les enjeux, sont en première ligne. Ils doivent faire preuve de prudence, vérifier leurs sources et utiliser des techniques de communication adaptées pour contourner la censure.

Le rôle essentiel des médias locaux

Comme l'avait dit Raymond Kuhn dans «The Media in Europe», édité en 2008, les médias locaux jouent un rôle crucial dans la diffusion d'informations de proximité, et dans la construction du lien social. En temps de guerre, leur rôle est encore plus important.

Les radios communautaires, les médias en ligne et les journalistes indépendants sont des acteurs essentiels de l'information dans les zones sous agression. Ils doivent s'organiser, se coordonner et mutualiser leurs ressources, pour surmonter les obstacles.

À Goma, la réalité est tout autre. Une très petite minorité de radios travaillent depuis l’occupation de la ville par l’Armée rwandaise. Ces médias ne font que balancer de la musique, les journalistes frustrés et confus, font profil bas, pour des raisons sécuritaires. 

L'impératif de soutenir la presse locale

La Communauté internationale doit se mobiliser, pour soutenir la presse locale. Les organisations de défense de la liberté de la presse, les ONGs et les bailleurs de fonds doivent apporter une aide financière et technique aux médias locaux.

Il est également essentiel de dénoncer les violations de la liberté de la presse et de demander des comptes aux auteurs de ces violations.

La guerre d'agression rwandaise et ses conséquences sur la presse

Il est crucial de rappeler que la guerre qui sévit dans l’est de la République démocratique du Congo est une guerre d'agression rwandaise. Cette agression a des conséquences dévastatrices sur la population civile et sur la liberté de la presse.

Les journalistes sont pris en étau entre les belligérants, et leur travail est entravé par les pressions et les menaces. Il est impératif que la Communauté internationale prenne ses responsabilités, pour mettre fin à cette agression et rétablir la paix dans la région.

Toutefois, dans ce contexte difficile, les journalistes font preuve de courage et de détermination. Ils continuent à informer la population, malgré les risques et les obstacles. Leur travail est essentiel pour garantir le droit à l'information, et pour contribuer à la construction d'une paix durable.

Samedi 1 mars 2025 - 20:30