Dossier Bukanga Lonzo : Le Consortium de lutte contre la corruption fustige l’ingérence politique et appelle à une justice indépendante

Catégorie
Image
Augustin Matata Ponyo, Premier ministre de la RDC entre 2012 et 2016
Augustin Matata Ponyo, Premier ministre de la RDC entre 2012 et 2016

Par Prehoub Urprus

Dans une déclaration ferme rendue publique, ce 18 avril 2025, le Consortium de Lutte contre la Corruption, composé d’organisations de la société civile et appuyé par l’IGF -Inspection Générale des Finances-, dénonce ce qu’il qualifie d’ingérence politique dans le traitement judiciaire de l’affaire Bukanga Lonzo. L’inquiétude est née de la récente sortie du président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, qui a publiquement invité la Cour constitutionnelle à régulariser la situation de l’ancien Premier ministre et actuel sénateur Augustin Matata Ponyo, mis en cause dans ce dossier.

Pour le Consortium, cette prise de position viole de manière flagrante la séparation des pouvoirs, pilier fondamental de tout État de droit. Il rappelle que l’article 150 de la Constitution consacre l’indépendance de la Justice, et que toute tentative d’influence ou de pression constitue un recul dangereux, fragilisant la crédibilité des institutions. Cette ingérence est d’autant plus préoccupante qu’elle intervient dans une affaire emblématique de mauvaise gouvernance, où l’Inspection Générale des Finances estime les pertes pour l’État à plus d’un milliard de dollars américains.

Le projet agro-industriel de Bukanga Lonzo, lancé pour moderniser l’agriculture et stimuler l’économie rurale, s’est soldé par un échec aux conséquences lourdes. Financé à hauteur de 285 millions USD par le Trésor public, il n’a jamais atteint ses objectifs. Une part importante des fonds reste sans justification probante, et l’arrêt prématuré du projet a privé le pays de gains économiques majeurs, tant en richesse nationale qu’en création d’emplois, recettes fiscales et développement local.

Au cœur du scandale, la question de l’immunité parlementaire s’invite dans le débat. Le Consortium rappelle que celle-ci ne saurait être utilisée comme un bouclier contre la Justice, surtout pour des faits présumés de détournement de fonds publics antérieurs au mandat parlementaire. Il estime qu’une telle posture renforce la culture de l’impunité et affaiblit la confiance des citoyens dans la capacité de l’État à sanctionner les crimes économiques.

Le Consortium appelle les institutions à se montrer à la hauteur des principes constitutionnels et des engagements internationaux de la RDC en matière de lutte contre la corruption. Il enjoint la Cour constitutionnelle à faire preuve d’impartialité, exhorte le Parlement à engager une réflexion sur la limitation des immunités en cas de crimes économiques, et encourage la Présidence à réaffirmer son attachement à l’État de droit.

Enfin, il interpelle directement Augustin Matata Ponyo, l’invitant à se mettre à la disposition de la Justice, et appelle les citoyens à rester mobilisés. Pour les signataires, l’affaire Bukanga Lonzo ne doit pas être un échec oublié, mais un tournant dans la lutte contre l’impunité en RDC.

Samedi 19 avril 2025 - 15:44